Dans un récent article, posté sur son site web officiel, Amnesty International se préoccupe de la probable fermeture précipité de la Cour pénale spéciale (CPS) de la République centrafricaine, qui a fort risque de mettre en mauvaise posture des milliers de victimes et de survivant·e·s qui espèrent obtenir justice pour les crimes graves commis au cours de deux décennies de conflit.
La CPS agonise. Inaugurée le 22 octobre 2018, elle a pour mandat d’enquêter et de poursuivre les crimes relevant du droit international commis pendant les conflits en République centrafricaine (RCA) depuis 2003. Au cours de cette période, la RCA a connu des vagues de violence et des conflits armés ; des milliers de civil·e·s ont été tués, violés, enlevés, mutilés, blessés, déplacés ou ont vu leurs maisons incendiées.
Le budget de la Cour repose uniquement sur les contributions volontaires des États et des organisations internationales. Les États-Unis étaient son principal donateur, suivis par la mission de maintien de la paix des Nations unies MINUSCA et l’Union européenne. Cependant, en janvier 2025, les États-Unis ont suspendu leur financement à la CPS, laissant environ 4,15 millions de dollars d’engagements impayés. Cette réduction drastique a profondément affecté la capacité de la Cour à fonctionner, compromettant les procédures en cours et les services essentiels apportés aux victimes et aux témoins.
« Malgré les efforts des autorités, les tribunaux nationaux ne disposent toujours pas des ressources et capacités nécessaires pour assumer le mandat dont a été chargée la CPS. Il est essentiel de soutenir ces tribunaux, mais mettre fin au financement de la CPS avant qu’ils n’aient les capacités requises reviendrait à laisser l’impunité l’emporter », a déclaré Marceau Sivieude, Directeur adjoint du bureau régional d’Amnesty International en Afrique de l’Ouest et du Centre.
D’après lui, si malheureusement la CPS en venait à fermer ses portes en ayant poursuivi seulement quelques individus qui n’étaient pas des leaders, et pour quelques incidents récents, elle aura largement manqué à son mandat et déçu les espoirs et attentes de la population centrafricaine. Il ajoute : « Les victimes et les survivant·e·s de crimes relevant du droit international ont droit à la vérité, à la justice et à des réparations ».
La CPS a mené trois procès (dont deux sont encore en phase d’appel) et compte actuellement une vingtaine de dossiers en attente d’être jugés. La Cour a également émis des mandats d’arrêt contre près de 50 personnes, dont beaucoup sont toujours en fuite.
Il reste actuellement trois ans au mandat de la CPS.